Lorsque l’on arrive dans l’ESAT Hélène Rivet, on est toujours impressionné par la taille du lieu industriel mais arrivé au fond, on est saisi par la douce odeur du chocolat.
Depuis près de 10 ans, Frédéric Cerre est moniteur de l’atelier chocolaterie de l’ESAT où il accompagne une 20aine d’ouvriers en situation de handicap qui travaillent activement toute l’année pour créer, notamment, les délices de la marque Les Chocadores. Ce projet de fabrication propre, certifié bio, a été lancé en 2012 et vu le jour en 2016, pour changer du conditionnement pratique. Immersion dans l’atelier chocolat…
Le chocolat dans le cœur
Nous retrouvons Frédéric au milieu des ouvriers, en pleine préparation des commandes des fêtes de fin d’année. Tout en aidant une travailleuse à couper le papier bulle qui entoure des boites de chocolat, il revient sur son parcours :
« J’ai commencé par un Cap puis un BTM (Brevet Technique des Métiers) en tant que pâtissier chocolatier. Ça m’a tellement plu que j’ai voulu passer un diplôme supérieur en chocolaterie. J’ai travaillé dans différentes chocolateries, chez un meilleur ouvrier de France, une chocolaterie bio en Savoie où j’ai fait un développement d’artisanat en chocolaterie semi-industrielle.
Je suis arrivé sur Lyon en raison d’une rencontre amoureuse. J’ai trouvé un premier job à Tassin-la-Demi-Lune à la chocolaterie de l’horloge, montée par un autre meilleur ouvrier de France. J’étais le seul chocolatier, les autres étaient boulangers. Ils ont rencontré des difficultés financières. J’ai donc cherché ailleurs et je suis tombé sur l’offre d’emploi de l’ALGED. »
Découverte du milieu du handicap
« Je ne connaissais pas le milieu du handicap. J’ai été pris à l’essai, dans un premier temps pour faire du tri de courrier le temps d’un congé, pour voir si le secteur pouvait me plaire et si je pouvais correspondre. M. Piron, le directeur de l’ESAT avant M. Lhomme, m’attendait tous les soirs à la sortie en me disant « et alors ? C’est simple, non ? » Ce n’était pas si simple ! Le secteur est riche et il y a plein de choses que les ouvriers faisaient que je ne comprenais pas. Mais tout s’est bien passé et j’ai été embauché. » ajoute-t-il rieur.
« En 2016, l’ESAT a commencé par acheter une turbine et un fondoir. Il a fallu faire des essais à l’ESAT. On a commencé par amandes et noisettes. On a eu notre 1ère commande avec La vie Claire que nous avions démarchée avec M. Piron et un stagiaire. Nous avons eu une énorme commande. On s’est donc installé à côté, au SIP (Service d’Insertion Professionnelle) et voyant que tout fonctionnait, le directeur a monté un dossier pour que nous puissions avoir un local qui a été construit en 2017. »
Ainsi, l’ESAT propose donc ses services de conditionnement pour de nombreuses entreprises mais produit également ses propres créations, vendues sous le nom des Chocadores qui connaissent un réel succès !
Une activité qui s’est créée en douceur
Frédéric s’interrompt et nous invite à le suivre, cette fois à côté des ouvriers en pleine fabrication de petites billes chocolatées. Il poursuit :
« Ils m’ont laissé la liberté ou la responsabilité je ne sais pas » reprend-t-il toujours allègre « de dessiner les plans avec la seule réelle contrainte qu’il y ait 12 travailleurs qui puissent travailler avec moi. Il a fallu prendre en compte les lave mains pour l’hygiène, les évacuations pour le ménage, les contraintes techniques pour la température et l’hydrométrie…
Au début je travaillais la moitié du temps sur du conditionnement d’épices pour Agidra et l’autre moitié à la conception du chocolat avec une dizaine de travailleurs. On s’est fait connaître, on a évolué, maintenant on est entre 13 et 20 selon la période de l’année et les commandes. »
Du chocolat toute l’année
« Cette année on a commencé la production au mois d’avril. L’objectif désormais, c’est de travailler toute l’année, d’augmenter la gamme et améliorer le savoir-faire des ouvriers ».
En 2022, à la demande d’un client, l’ESAT a développé des noix de cajou enrobées de chocolat et a profité de ce développement pour demander la certification bio de ses produits.
La certification bio a permis à la chocolaterie d’avancer encore dans la professionnalisation et le développement de sa gamme, comme pour chaque produit lancé par l’ESAT où les échecs font aussi progresser. « Les noix de cajou au chocolat blanc n’ont pas fonctionné. » explique Fred serein « Nous avons donc remplacé par du chocolat noir et ça se vend désormais très bien. L’année dernière on a sorti des noix de cajou au chocolat noir et des billes de maïs soufflé enrobées en chocolat au lait et chocolat noir qui se vendent très bien aussi. On s’est fait dévaliser pour les maïs, par le Regard Français » conclut-il ravit.
Si la demande de Chocadores ne cesse de croître doucement, le conditionnement bat son plein aussi dans l’ESAT pour anticiper les commandes de Noël et les cadeaux d’entreprises.
« En ce moment par exemple, on fait du packaging sur mesure pour actua, 2000 coffrets pour odealim, 20 500 pièces pour Domitis à faire en 4 semaines, on travaille pour le Regard Français, Rgoods, Goodtoknow, odinys, Arkema mais on fait aussi de plus petites commandes comme pour la mairie de Rochetaillée sur Saône…
L’année dernière, on a fait 12 000 boîtes pour les fêtes de fin d’année. Aujourd’hui on en est à 30 000 boîtes. »
Un accompagnement adapté à chacun
Dans cet atelier, certaines personnes ne peuvent pas travailler debout, d’autres ne peuvent pas porter d’objets lourds. « Les postes sont adaptés à chacun. Il y a aussi 3 personnes malentendantes, je prends donc des cours de LSF tous les mercredis matin avec d’autres collègues » explique Frédéric, « et en complément, il y a une monitrice polyvalente, Blandine Bertin qui m’aide régulièrement et Vincent Albaret, qui a accepté d’être formé pour apprendre le métier de chocolatier. Il est désormais formé et m’aide lors des pics d’activités ».
Et lorsque l’on demande à Frédéric ce qui lui plait dans son quotidien : « La transmission de mon savoir-faire avec des personnes volontaires, motivées et même super motivées ! Ça m’a étonné en arrivant. Ici le travail a vraiment du sens, les personnes présentes veulent vraiment travailler. Elles ont la soif d’apprendre alors même que le métier est très technique. Le chocolat est une matière vivante. La personne doit s’adapter au chocolat. Si elle met trop d’air ou pas assez, cela ne fonctionnera pas. De même pour la vitesse de rotation. Tous ces petits paramètres font la qualité du chocolat que les personnes accompagnées doivent comprendre pour maîtriser. Il y a aussi le froid, le bruit… Et même avec ça, on a plein de monde qui voudrait venir travailler ici. Ce qu’il manquerait, ce sont des machines complémentaires mais quoi qu’il arrive, tout le monde n’est pas fait pour travailler en chocolaterie ».
Vivien, qui travaille auprès de Frédéric confie « Moi, ça fait des années que je travaille avec Fred, il m’a toujours encouragé. Avec lui l’ambiance est bonne, il y a de la confiance, et ça c’est énorme. On a beaucoup de chance d’avoir cette confiance du moniteur. »
>> Retrouvez nos chocolats sur www.leschocadores.com
>> ou en vente directe à Max Saveurs à Lyon 9.