Presque caché au milieu des habitations du quartier de la Sarra, à quelques mètres de la basilique de Fourvière, se dresse un petit écrin de verdure où chaque coin du jardin a son histoire. C’est dans ce jardin de la Sarra, tenu par l’association Gaïa Lyon, que nous rencontrons un groupe de résidents des foyers Jean-Pierre Delahaye. Dominique, David, Daniel et Franck, accompagnés de Florence Gérald, aide médico-psychologique à l’ALGED, retrouvent sur place Alice Sender, animatrice maraîchère qui contribue à faire de ce jardin un lieu d’accueil, d’échange et de biodiversité incroyable.

 

Un lieu de partage avant tout

En arrivant sur place, on sent tout de suite la bienveillance et la complicité qui règnent sur place. « Vous voulez du thé, du café ? » propose une bénévole présente ce jour. Chacun prend place sur la petite table entre les grands arbres. « Aujourd’hui, on va planter des fèves de « super aguadulce » annonce Alice. Les résidents, curieux, s’avancent vers le grand paquet de graines pour découvrir ce dont il s’agit. « C’est léger, et ça sent bon » observe Daniel.

« On y va, Alice ? » s’impatiente Franck. « J’amène la caisse à outils » renchérit Dominique.

Voici toute la petite équipe qui part faire un état des lieux du jardin, entretenu également au quotidien par des écoles, des entreprises en activité de team building ou par l’équipe de jardiniers de Gaïa.

Après les premières explications de semence d’Alice, chacun trouve sa place et se lance les mains dans la terre. « David, il faut que tu mettes bien tes mains dans la terre pour reboucher les trous. Et regarde, ici il n’y a pas de graines », soutient Florence.

Ici, chacun avance à son rythme et prend le temps de participer à l’atelier. Et si le jardinage peut se révéler un réel moment de détente, il permet aussi aux résidents une activité extérieure constamment différente, mais aussi de repérer les saisonnalités, d’améliorer leur forme physique, de faire preuve de patience…

Daniel explique : « J’étais déjà venu participer à un atelier avec Alice. Aujourd’hui, on a mis des graines en terre qui pousseront. On a fait des trous, mis les graines dedans… »
Dominique ajoute « et moi je les ai recouvertes avec de la terre. »

 

Partager le travail de la terre : une thérapie universelle

Et lorsque l’on demande à Dominique ce qu’elle pense de cette activité, elle explique, concentrée : « On vient régulièrement. J’aime jardiner dans les différents bacs, mettre les graines d’agrumes et les parsemer avec la terre. J’aime aussi porter des seaux quand on fait du compost, désherber… mais pour ça faut attendre que le terrain soit moins humide. Quand je viens, ici je me sens décontractée, je me sens bien. Je me sens dans « l’ambiance du jardinage ». Je vais arrêter certaines de mes activités parce que je suis vieille maintenant, mais pas le jardinage », ajoute-t-elle déterminée.

La bénévole présente sur place semble conquise par ce projet. « Je trouve ça génial que ce partenariat se fasse avec les résidents de l’ALGED pour qu’ils puissent pratiquer le jardin. En participant, ils retrouvent une normalité d’usager ; Ils viennent faire une activité, comme n’importe qui. C’est un moment ouvert qui redonne à ces personnes un espace de vie qui est un espace communautaire […] La personne singulière se retrouve ici, elle peut se projeter dans une situation ordinaire. On valorise ce qui est ordinaire chez ces personnes. Et pour ma part, je fais l’hypothèse que ça apporte réellement à tous. »

 

Un apprentissage constant et réciproque

Florence, salariée depuis une dizaine d’années au foyer de vie explique : « On vient depuis 2 ans ici, tous les 15 jours les vendredis sauf quand il fait trop froid ou qu’il pleut trop. Il est important que les résidents fassent des activités en dehors du foyer, avec des professionnels extérieurs qui connaissent leur métier et qui nous apprennent plein de chose. Le bénéfice complémentaire de cet atelier, c’est que les résidents suivent l’évolution des plantes jusqu’à manger ce qu’ils ont planté et récolté. On voit le légume évoluer, ça fait travailler tous les sens. Et les résidents évoluent : on apprend à mieux repérer leurs capacités ou leurs difficultés. Pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer, des activités se font aussi en interne, dans des jardinières, juste en bas du foyer. »

 

Alice conclut « Ici, on préserve au maximum la biodiversité : on fait de la tonte raisonnée, on n’utilise pas de produits chimiques, on fait de l’agroécologie, je plante des fleurs en bout de bacs qui vont attirer les insectes pollinisateurs… Mais l’important ce sont aussi les relations, les liens tissés. Et j’apprécie vraiment de travailler avec les résidents. Je me sens très à l’aise avec eux, je les sens très honnêtes. C’est un de mes groupes préférés. » ajoute-t-elle malicieusement.