Cet article est tiré d’un mémoire effectué par Clémence Romet, stagiaire en communication au sein de l’ALGED durant 6 mois.

La vie intime affective et sexuelle (VIAS) des personnes accompagnées a pendant longtemps été négligée par les parents, les institutions et les différentes associations dans lesquelles elles étaient prises en charge. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas mais il reste encore beaucoup à faire pour que les personnes soient accompagnées au mieux vers ce qu’elles souhaitent et lever certains tabous qui persistent. L’ALGED s’est saisie de ce sujet de manière précoce, avec l’observatoire vie affective, sexualité et couple né en 2000. La première loi pour une intimité des personnes date de 2002.

Les personnes accompagnées peuvent faire le choix d’avoir une vie affective et sexuelle au sein de l’ALGED

Les parents jouent un rôle important dans la construction de leur enfant. Les personnes accompagnées sont encore très souvent infantilisées, même à l’âge adulte, comme l’expliquent Jacqueline Delville et Michel Mercier dans leur article sexualité, vie affective et déficience mentale datant de 1997. Les personnes accompagnées sont souvent considérées comme de « grands enfants ».

Au sein de l’ALGED, il est possible pour les personnes majeures qui le souhaitent de faire partie de groupes de paroles. Elles peuvent poser leurs questions. Certains professionnels rencontrés, comme Sara, expliquent que les personnes accompagnées n’ont pas forcément le même niveau de compréhension sur leur corps.

Les personnes accompagnées ont le droit à la sexualité. La circulaire Sophie Cluzel datant de 2018 rappelle ce droit à l’intimité. Les professionnels tentent de le faire comprendre en utilisant des moyens comme des supports vidéo, le FALC, des jeux… La compréhension de ces droits passe par la répétition pour que les personnes connaissent et puissent faire respecter leurs droits.

Des tabous qui ont longuement existé

Les personnes en situation de handicap n’ont aucune sexualité. Laetitia, professionnelle explique : « avoir une relation sexuelle, woa, est-ce possible ? » Dominique Bonmalais directeur d’IME à la Réunion explique : « l’opinion dominante, tant dans le milieu familial qu’institutionnel, est celle d’une sexualité absente, pauvre, innocente, voire un déni. » Le tabou ne vient pas uniquement des parents, il vient également des établissements dans lesquels les personnes sont accompagnées. » Il existe encore en 2022, selon François Vialla, enseignant chercheur en droit médical et de la santé, des établissements dans lesquels les règlements prohibent toute relation sexuelle.

Les personnes accompagnées n’ont pas la capacité d’avoir des enfants. L’entretien mené avec Benoit et Laetitia, éducateurs fut riche en enseignement. En effet, beaucoup de parents de personnes accompagnées partent du principe que leur enfant n’aurait pas le désir d’avoir un enfant. Dans 90 % des cas, lorsqu’une femme en situation de handicap est enceinte, les parents demandent qu’elle avorte. Certaines personnes se censurent. Nous avons également abordé la question de la ligature des trompes qui était souvent pratiquée à l’insu des femmes. Une fois, Laetitia et d’autres professionnels ont réussi à arrêter les parents avant qu’ils fassent ligaturer les trompes de leur fille, car elle en comprenait mal les enjeux. Une réalité non négligeable subsiste : aujourd’hui les établissements n’ont pas la capacité pour accueillir des couples ou une personne seule avec enfants.

Il existe également un schéma dominant pour le couple : l’hétérosexualité. Ainsi, L’homosexualité a pendant longtemps été taboue au sein des institutions. Les professionnels rencontrés essaient de faire en sorte d’être inclusifs. Par exemple, des professionnels d’IME font ne parlent plus de petit copain pour une femme et de petite copine pour un homme. Les différentes sexualités sont abordées au sein des groupes de parole.

Des comportements inadaptés…

Les personnes accompagnées ne sont pas à l’abri de ce qu’il se passe dans nos sociétés. Elles peuvent parfois être agressées ou agresseurs. Il reste encore des tabous sur ces questions, car il est compliqué de trouver de la documentation sur la question des violences sexuelles. Les professionnels interrogés n’ont pas du tout évoqué une personne accompagnée en agressant un autre. Ils relatent des agressions de personnes extérieures sur des personnes accompagnées.

Un groupe de psychoéducation mis en place en mars dernier au sein de l’ALGED. L’idée de ce groupe est partie de l’unité mobile, car deux personnes avait des difficultés avec les thématiques de VIAS. Conséquence pour l’une d’elle, aucun établissement ne pouvait l’accepter.

Ce groupe est novateur pour plusieurs raisons :

  • Ce groupe est composé de personnes qui avaient eu des comportements inadaptés ou même certains interdits par la loi.
  • Ce groupe a été créé afin d’apporter de l’information collective.
  • Ce groupe est un espace sécurisant où les personnes pouvaient poser leurs questions sans avoir la crainte d’être jugées.
  • Ce groupe a permis à des personnes de voir qu’elles n’étaient pas seules.
  • Les séances étaient de 2h toutes les semaines, ce qui est assez rare, car la plupart des professionnels rencontrés les tiennent moins régulièrement, soit plutôt d’une durée d’1h.
  • Ce groupe a débuté au mois de mars 2024, pour le moment il est expérimental. Les professionnelles souhaiteraient pérenniser le dispositif.

L’ALGED communique sur les questions de vie intime, affective et sexuelle des personnes qu’elle accompagne, car elles ont le choix de pouvoir vivre des relations comme tout un chacun. Le rôle des parents et des professionnels sur ces questions est très important. Tous n’ont pas la même aisance pour aborder les sujets liés à la sexualité. Les lois sont très claires sur le droit à la vie intime, affective et sexuelle des personnes en situation de handicap mental, elles ont le droit d’en avoir. Il est important de communiquer pour que les tabous sur ces sujets disparaissent. Il en existe encore, même s’il y a de nettes améliorations sur ces questions. Les institutions peuvent aussi parfois limiter cette vie intime, affective et sexuelle, notamment par le biais des règlements intérieurs, des contraintes…