En cette période printanière, nous nous nous rendons sur le site du Val d’Ozon où nous rencontrons Hugo Buisson-Simon. Il est pair-aidant professionnel au SAMSAH : « je suis atteint d’un trouble psychique vis à vis duquel j’ai enclenché un travail intellectuel et émotionnel me permettant d’avoir un recul critique sur mes symptômes. J’ai mis en place des stratégies afin de vivre au mieux avec ma maladie et je suis donc inscrit dans une dynamique de rétablissement ». Il travaille au sein d’une équipe pluridisciplinaire composée d’infirmiers, d’ergothérapeutes, de psychologues et de CESF… Nous avions déjà écrit un article à son propos en juin. Depuis, il a validé son diplôme universitaire de pair-aidance en santé mentale au mois de septembre et poursuit son activité salariée à l’ALGED.
La particularité du métier de pair aidant
Le pair-aidant est un atout dans une équipe pluridisciplinaire. Il ne se substitue pas aux compétences académiques et pluridisciplinaires des autres soignants de l’équipe, au contraire : il est un apport supplémentaire au vu de son expérience du trouble psychique. « Dans le cadre de cette pratique, faire partie d’une équipe pluridisciplinaire permet de travailler en complémentarité avec les autres soignants en apportant un regard nouveau et authentique sur ce qu’est de vivre avec une maladie mentale. Ma mission principale est de permettre aux personnes accompagnées de penser leur rétablissement et de les accompagner afin qu’elles puissent donner du sens à leur expérience de la maladie. Je suis là pour accompagner la personne à trouver ses propres stratégies. »
Une journée de pair-aidant
Les journées d’un pair-aidant sont riches et variées. Hugo travaille différemment selon les personnes qu’il rencontre. « Je travaille actuellement à mi-temps. En arrivant au service, je commence par regarder les relèves qui ont été faites. C’est un résumé de ce qui a été dit ou été fait pendant que j’étais absent. Je me rends ensuite au domicile des personnes. Parfois je peux animer des groupes de psychoéducation. Je travaille énormément en équipe : c’est ce qui me plait beaucoup dans mon métier. Quand nous débutons un nouvel accompagnement au SAMSAH, nous nous déplaçons souvent à deux pour nous présenter auprès de la personne que nous commençons à accompagner. Au-delà de cette modalité ci, comme mes collègues, je me déplace seul la plupart du temps. »
La nouveauté du métier de pair-aidant
Le métier de pair-aidant est récent. A Lyon, actuellement il n’existe qu’une seule formation dédiée à cette profession. « J’ai été embauché dans une équipe sensibilisée à la pair-aidance. Au SAMSAH, mon responsable de service a travaillé en amont pour bien cerner l’apport de ce métier. Je suis arrivé dans une équipe très accueillante et préparée : c’est une chance. Dans certaines structures, les pair-aidants ont été embauchés pour répondre à des appels d’offres. Parfois, ils n’ont pas de missions ni même de responsabilités. Les fiches de métiers ne sont pas encore complétement établies. »
Une fonction porteuse d’espoir
Selon la MDPH de Seine et Marne pour être pair-aidant en santé mentale, il faut impérativement avoir été malade et être rétabli ou plutôt en cours de rétablissement. « Le pair-aidant peut être porteur d’espoir, car il incarne la possibilité de s’en sortir. Bien que nous ayons un trouble, en tant que personnes concernées, nous pouvons tous mobiliser le pouvoir d’agir et l’autodétermination nécessaires afin de mener la vie que nous souhaitons. Le fait d’effectuer un travail d’introspection et de mieux se connaître soi et son trouble aide à partager ses ressources et stratégies. Je ne suis pas formé en psychologie mais j’ai les compétences pour dialoguer à propos de mon expérience personnelle de la maladie mentale, appelées savoirs expérientiels. Parfois, je vois que sur le moment, la personne ne va pas totalement être réceptive à mon partage. Heureusement, le travail se fait de manière progressive. Et comme tout professionnel du médico-social, même en faisant de son mieux pour s’adapter au public, le pair-aidant et ses compétences ne sont parfois pas suffisantes ou adaptées, d’où l’intérêt de travailler en équipe. »
Le métier de pair-aidant est encore peu connu. Il gagne à être visibilisé car la santé mentale, longtemps taboue, est progressivement mise sur le devant de la scène et mieux accompagnée. Charles Gardou, dans ses travaux anthropologiques, conçoit le handicap comme un « singulier-universel » qui verse les humains dans une même direction : leur désir vital de se sentir exister qui, par-delà ce qui sépare la réalité des vies, s’impose avec la force d’un espoir toujours menacé. Les dimensions de l’universel et du singulier s’engendrent et se nourrissent mutuellement affirme-t-il.